À propos de l’auteur
Vincent Constant
Ingénieur en Transition Énergétique
Directeur Général – ENOV
Face à l’urgence climatique et à la nécessité de réduire les consommations d’énergie, l’audit énergétique s’impose comme un outil stratégique pour améliorer la performance énergétique des bâtiments et des installations. Il ne s’agit plus seulement d’une bonne pratique : dans certains cas, la réglementation le rend obligatoire.
Mais de quoi s’agit-il concrètement ? Qui est concerné, et dans quelles conditions ? Cet article propose un éclairage complet sur les obligations en matière d’audit énergétique, les professionnels habilités à les réaliser, les situations dans lesquelles il devient incontournable, ainsi que les démarches à suivre pour s’y conformer.
Sommaire de l’article :
Qu’est-ce qu’un audit énergétique ?
Un audit énergétique est une analyse approfondie de la consommation d’énergie d’un bâtiment, d’un site industriel ou d’un parc immobilier. Il vise à identifier les postes de consommation, à évaluer les pertes énergétiques et à proposer des solutions concrètes pour les réduire.
Il s’appuie sur des relevés de données, des visites sur site, des simulations thermiques et une évaluation des coûts des travaux à engager. L’objectif final est de définir des pistes d’amélioration permettant des économies d’énergie substantielles, tout en augmentant le confort et en valorisant le patrimoine immobilier.
Qui réalise l’audit énergétique ?
L’audit énergétique doit être réalisé par un professionnel qualifié, indépendant et impartial. En fonction du type de bâtiment et de la réglementation en vigueur, plusieurs profils peuvent intervenir : bureaux d’études spécialisés en thermique du bâtiment, ingénieurs énergéticiens, ou encore entreprises certifiées par des organismes reconnus.
Pour les audits obligatoires dans le cadre de la vente de logements énergivores (étiquettes F ou G), seuls les auditeurs certifiés selon le référentiel défini par l’ADEME ou COFRAC peuvent intervenir.
Quelles études et formations pour réaliser un audit énergétique ?
Les professionnels souhaitant réaliser des audits énergétiques doivent disposer de compétences solides en thermique du bâtiment, en analyse de données énergétiques et en réglementation.
Ils doivent également suivre des formations spécifiques et obtenir une certification reconnue. Parmi les parcours possibles : un diplôme d’ingénieur en génie énergétique, un master spécialisé en efficacité énergétique, ou une formation continue délivrée par des organismes agréés.. Le respect des normes NF EN 16247-1 à 5 est souvent exigé.
Quelles législations et lois rendent obligatoire l’audit énergétique ?
L’audit énergétique est encadré par plusieurs textes réglementaires, issus des lois Grenelle, de la loi Climat et Résilience, ainsi que du Code de la construction et de l’habitation.
L’audit énergétique est devenu un outil essentiel pour lutter contre le gaspillage énergétique et les émissions de gaz à effet de serre. Il est particulièrement important dans le cadre de la transition énergétique, car il permet de cibler les actions à entreprendre pour améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments. La législation française impose cet audit dans certains cas précis, dans un souci d’améliorer la performance énergétique des bâtiments et d’atteindre les objectifs nationaux de réduction des émissions de CO2.
Les lois et règlements qui rendent l’audit énergétique obligatoire s’appuient sur des objectifs ambitieux en matière de réduction de la consommation d’énergie et d’amélioration de la performance énergétique. Les textes législatifs qui encadrent cet audit énergétique ont évolué au fil du temps pour s’adapter aux enjeux climatiques. Plusieurs textes de loi et décrets encadrent ces obligations, en fonction de la nature des bâtiments, de leur usage, ainsi que des travaux réalisés.
Les principaux textes législatifs et réglementaires :
- La loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010, dite « Loi Grenelle II »
La loi Grenelle II a instauré une série de mesures pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre et la promotion de l’efficacité énergétique. Elle impose un audit énergétique dans les bâtiments tertiaires de plus de 1 000 m², ce qui concerne principalement les bâtiments à usage commercial, administratif et industriel. Cette loi a été l’un des premiers textes à rendre l’audit énergétique obligatoire pour une catégorie de bâtiments en France, dans un souci de réduction de la consommation d’énergie. - La loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte (LTECV)
Cette loi, pierre angulaire de la politique énergétique de la France, a renforcé les obligations d’audit énergétique pour certaines entreprises. Elle impose des audits énergétiques tous les 4 ans aux entreprises de plus de 250 salariés ou ayant un chiffre d’affaires supérieur à 50 millions d’euros, afin de les inciter à mettre en œuvre des mesures pour améliorer leur efficacité énergétique. En outre, elle introduit des objectifs clairs de réduction des consommations énergétiques à l’échelle nationale. - Le décret n° 2017-918 du 9 mai 2017 relatif à l’audit énergétique dans les grandes entreprises
Ce décret est venu préciser les modalités d’application des obligations d’audit énergétique pour les entreprises de plus de 250 salariés. Il oblige ces entreprises à réaliser un audit énergétique tous les quatre ans. En outre, il établit que l’audit doit être réalisé par un professionnel qualifié et doit être axé sur l’évaluation des consommations d’énergie dans les bâtiments et les équipements, ainsi que sur la mise en place de solutions permettant une meilleure gestion énergétique. - La directive européenne 2018/844 relative à la performance énergétique des bâtiments (revu en 2020)
La directive européenne sur la performance énergétique des bâtiments, qui fait partie du paquet « Climat et Energie 2030 », impose aux États membres de mettre en œuvre des mesures pour renforcer l’audit énergétique dans les bâtiments. En France, cela a conduit à l’intégration de nouvelles exigences concernant l’audit énergétique dans les bâtiments résidentiels et tertiaires. Elle invite les États à adopter des stratégies ambitieuses pour améliorer la performance énergétique de leur patrimoine bâti, avec des exigences spécifiques en matière de rénovation.
Quelles sont les conditions et situations qui le rendent obligatoire ?
L’audit énergétique obligatoire s’applique dans des situations bien définies, en fonction de la taille des bâtiments, de leur usage et des travaux réalisés. Cette mesure est surtout présente dans les secteurs tertiaires et industriels, mais elle s’étend également à certains types de rénovations dans le secteur résidentiel. Il existe ainsi différentes conditions sous lesquelles un audit énergétique doit être réalisé.
- Les entreprises de plus de 250 salariés
Selon la loi de transition énergétique pour la croissance verte (LTECV), un audit énergétique est obligatoire tous les 4 ans pour les entreprises de plus de 250 salariés. Ces entreprises, dont le chiffre d’affaires dépasse les 50 millions d’euros, doivent réaliser un audit de leurs installations, incluant les bâtiments, le chauffage, la climatisation, l’éclairage, et les systèmes de ventilation. L’objectif est de s’assurer que les entreprises prennent des mesures pour réduire leur consommation énergétique et respecter les engagements climatiques nationaux. - Les bâtiments tertiaires de plus de 1 000 m²
L’audit énergétique est également obligatoire pour les bâtiments tertiaires de plus de 1 000 m². Ce décret, établi par la loi Grenelle II, s’applique à tous les bâtiments à usage administratif, commercial, ou industriel. L’audit doit couvrir l’ensemble du bâtiment, et ses conclusions doivent aboutir à la mise en place de solutions pour améliorer l’efficacité énergétique du bâtiment (rénovation thermique, remplacement de systèmes de chauffage obsolètes, etc.). - Les bâtiments faisant l’objet de rénovations lourdes
En cas de rénovation lourde, où plus de 25 % de la surface de l’enveloppe du bâtiment est modifiée, un audit énergétique peut être exigé pour valider la conformité du projet avec les normes énergétiques en vigueur. Cela permet de s’assurer que les travaux visent bien à améliorer l’efficience énergétique du bâtiment et qu’ils respectent les normes fixées par la réglementation thermique. - Les logements collectifs ou bâtiments d’habitation
Dans le cadre des rénovations, notamment dans les bâtiments d’habitation, l’audit énergétique peut devenir obligatoire, par exemple, dans le cadre des travaux de réhabilitation énergétique des copropriétés. Ce type d’audit permet de définir les travaux nécessaires pour réduire les consommations d’énergie (isolation, équipements plus performants, etc.).
Comme évoqué plus haut, ces conditions sont spécifiées dans des textes législatifs comme la loi Grenelle II, la LTECV, et les décrets qui en découlent. L’objectif est d’identifier les bâtiments les plus énergivores et d’y apporter des améliorations substantielles afin de limiter les dépenses énergétiques et réduire les émissions de gaz à effet de serre.
Les audits énergétiques sont donc un levier majeur dans la mise en œuvre des politiques publiques visant à améliorer la performance énergétique des bâtiments, notamment dans le cadre des objectifs climatiques de la France.
Quelles différences entre audit énergétique et DPE ?
Bien que complémentaires, l’audit énergétique et le DPE (Diagnostic de Performance Énergétique) ont des finalités différentes.
Le DPE est un outil de sensibilisation qui fournit une estimation simplifiée de la consommation d’énergie et des émissions de gaz à effet de serre. Il est obligatoire pour la vente ou la location d’un bien.
L’audit énergétique, lui, va beaucoup plus loin : il repose sur des données réelles, propose plusieurs scénarios de travaux chiffrés, et évalue les gains énergétiques associés. Il constitue un véritable plan d’action vers la rénovation énergétique.
Comment se déroule l’audit énergétique ?
L’audit énergétique est un processus méthodique qui permet d’évaluer la performance énergétique d’un bâtiment ou d’une installation. Son objectif est de dresser un état des lieux de la consommation d’énergie, d’identifier les points de déperdition, et de proposer des solutions pour améliorer l’efficacité énergétique. Ce processus se déroule généralement en plusieurs étapes, qui incluent la collecte des données, l’analyse des consommations, l’établissement des recommandations, et la présentation du rapport final.
Voici un développement détaillé des étapes d’un audit énergétique.
1. Préparation de l’audit
La première phase de l’audit énergétique consiste à préparer les éléments nécessaires à l’analyse. Cela inclut la prise de contact avec le client pour comprendre les objectifs de l’audit, les besoins spécifiques, et les attentes vis-à-vis des résultats. L’auditeur énergétique se familiarise également avec le bâtiment ou l’installation à auditer, en prenant connaissance de documents tels que les plans du bâtiment, les factures d’énergie, et les historiques de consommation.
2. Collecte de données sur les consommations énergétiques
Une fois la phase de préparation réalisée, l’auditeur se rend sur place pour observer les installations. L’objectif est de collecter des informations détaillées sur les équipements utilisés (chauffage, ventilation, climatisation, éclairage, appareils électroniques, etc.), ainsi que sur le système de gestion de l’énergie dans le bâtiment. Des relevés de consommations sont effectués, souvent sur une période d’au moins un an, afin de mieux comprendre les tendances et les pics de consommation.
3. Analyse des données collectées
Une fois les données collectées, l’auditeur procède à une analyse approfondie pour déterminer les points faibles en matière d’efficacité énergétique.
À cette étape, l’auditeur peut également calculer les gains énergétiques possibles en fonction des solutions de rénovation envisagées et des normes énergétiques à respecter.
4. Proposition de recommandations
L’auditeur énergétique, sur la base des données collectées et de l’analyse effectuée, établit des recommandations concrètes pour améliorer l’efficacité énergétique du bâtiment ou de l’installation.
Ces recommandations peuvent prendre plusieurs formes, en fonction des priorités identifiées : travaux d’isolation, amélioration des équipements de chauffage et de climatisation, optimisation du système de ventilation, remplacement des équipements d’éclairage, gestion de l’énergie et automatisation.
5. Rédaction du rapport d’audit énergétique
Une fois les recommandations établies, l’auditeur rédige un rapport détaillé qui présente les résultats de l’audit.
Le rapport final est remis au client et peut être utilisé pour faire valoir les travaux nécessaires, demander des financements ou des subventions pour la rénovation énergétique, ou encore servir de base pour la conformité avec les exigences réglementaires en matière de performance énergétique.
6. Suivi et mise en œuvre des recommandations
L’audit énergétique peut être suivi d’un accompagnement pour la mise en œuvre des recommandations, notamment en termes de priorisation des actions à mener. Certaines entreprises choisissent de mettre en place un suivi des économies d’énergie réalisées après la mise en œuvre des mesures recommandées, afin de mesurer l’impact réel des actions entreprises.
L’audit énergétique est un outil clé pour réduire les coûts énergétiques et améliorer la performance énergétique des bâtiments. En suivant cette méthode structurée, les entreprises et les propriétaires de bâtiments peuvent non seulement répondre à leurs obligations légales, mais aussi réaliser des économies substantielles sur le long terme tout en contribuant à la transition énergétique.
Qui est concerné par l’audit énergétique ?
De nombreux acteurs sont concernés par l’audit énergétique :
- Les propriétaires de logements énergivores souhaitant vendre leur bien (étiquettes F et G).
- Les entreprises de taille importante, tenues par la directive européenne d’effectuer des audits réguliers.
- Les gestionnaires de bâtiments tertiaires, dans le cadre du décret tertiaire.
- Les collectivités locales, lorsqu’elles souhaitent engager des rénovations dans leur parc immobilier.
- Les copropriétés, notamment lorsque des travaux sont envisagés et qu’un plan pluriannuel est requis. L’audit énergétique devient un outil incontournable pour anticiper la réglementation, éviter les sanctions, mais aussi pour valoriser son patrimoine tout en réduisant son empreinte carbone.
L’audit concerne principalement les propriétaires de passoires thermiques souhaitant vendre, les copropriétés engagées dans un plan de rénovation, et les entreprises soumises à des obligations réglementaires. Mais au-delà de l’obligation, il s’adresse à tous les acteurs soucieux d’engager une démarche d’amélioration énergétique pérenne.
L’audit énergétique devient un passage clé pour accompagner la transition du parc bâti français vers des performances plus durables. Il constitue une étape structurante pour planifier les travaux, mobiliser les aides disponibles et réduire les consommations dès aujourd’hui.
Comprendre ses obligations permet d’anticiper, mais surtout d’agir efficacement pour l’avenir.