À propos de l’auteur
Manuel Gonzales
Energy Manager en alternance chez Audioptic
Élève à l’ENOV en Mastère TED.
La réglementation thermique pour les bâtiments existants évolue rapidement et offre un cadre de plus en plus contraignant à leur rénovation.
Il convient donc d’analyser si la transition énergétique des bâtiments au service de la décarbonation de notre économie est portée de la bonne manière et permet un développement effectif de la filière.
Sommaire de l’article :
- Une réglementation évolutive autour de la transition énergétique
- La réglementation thermique actuelle
- Réglementation de la Transformation digitale et énergétique des Bâtiments : Quelle est la réglementation RT2012 pour les bâtiments neufs ?
- Des évolutions rapides portant parfois à confusion
- Quelles sont les normes de construction pour 2025 ?
- La réglementation énergétique des bâtiments, partie importante d’une transition énergétique plus globale
Une réglementation évolutive autour de la transition énergétique
La réglementation en matière de transition énergétique des bâtiments évolue rapidement pour répondre aux enjeux climatiques et énergétiques.
Face à la nécessité de réduire les émissions de gaz à effet de serre et la consommation d’énergie, les gouvernements mettent en place des normes toujours plus exigeantes visant à améliorer la performance énergétique du parc immobilier.
En Europe, la directive sur la performance énergétique des bâtiments (DPEB) impose aux États membres des objectifs ambitieux, comme la généralisation des bâtiments à consommation d’énergie quasi nulle (nZEB) et l’interdiction progressive des logements les plus énergivores.
En France, la réglementation environnementale RE2020, entrée en vigueur en 2022, remplace la RT2012 et introduit de nouvelles exigences, notamment sur l’empreinte carbone des matériaux, la gestion de l’énergie et le confort thermique en période de forte chaleur. Cette évolution réglementaire ne concerne pas uniquement les constructions neuves, mais aussi la rénovation du bâti existant, avec des dispositifs comme MaPrimeRénov’, l’audit énergétique obligatoire pour les passoires thermiques et l’interdiction progressive de leur mise en location.
L’objectif est d’accélérer la décarbonation du secteur du bâtiment, qui représente près de 40 % des consommations d’énergie et plus de 20 % des émissions de CO₂ en France, en favorisant des solutions innovantes, durables et adaptées aux défis climatiques à venir.
La réglementation thermique actuelle
La réglementation en vigueur actuellement s’applique aux bâtiments construits avant 2012, c’est-à-dire ceux qui ne sont pas soumis à la RT 2012 ni à la RE 2020. Elle distingue deux types d’interventions en rénovation, chacune avec un niveau d’exigence spécifique :
- Les travaux ponctuels, qui concernent la rénovation d’un élément spécifique du bâtiment (isolation d’un mur, remplacement de fenêtres, amélioration du système de chauffage, etc.). Dans ce cas, la réglementation impose des critères de performance énergétique pour chaque élément rénové.
- Les rénovations lourdes, qui concernent des travaux représentant plus de 25 % de la surface de l’enveloppe du bâtiment (murs, toiture, planchers). Ces rénovations sont soumises à des exigences globales de performance énergétique pour l’ensemble du bâtiment, et non plus seulement pour les éléments pris individuellement.
Ces grandes directives vont être appliquées par deux textes d’applications, les arrêtés du 3 mai 2007 et du 22 mars 2017. L’idée est évidemment de dépasser le simple bilan énergétique, et de l’entourer de dispositifs plus prégnants.
L’arrêté du 3 mai 2007 : La réglementation thermique des bâtiments existants
Cet arrêté est le principal texte encadrant la rénovation thermique des bâtiments construits avant 2012. Il impose des exigences de performance énergétique en fonction de la nature des travaux entrepris. Il distingue deux catégories :
- Les exigences pour les éléments remplacés ou installés (travaux ponctuels)
Lorsqu’un élément d’un bâtiment est rénové ou remplacé (comme une fenêtre, une isolation, une chaudière, etc.), il doit respecter des performances minimales définies par l’arrêté. Par exemple :- Une isolation de toiture ou de murs doit respecter un coefficient de résistance thermique minimum.
- Un nouveau système de chauffage doit avoir un rendement énergétique suffisant.
- Les menuiseries remplacées doivent avoir un coefficient de transmission thermique (Uw) conforme aux seuils définis par la réglementation.
- Les exigences pour les rénovations lourdes (plus de 25 % de l’enveloppe du bâtiment)
Pour ces travaux d’envergure, la réglementation impose une performance énergétique globale du bâtiment, similaire à une démarche de conception neuve, avec une consommation maximale d’énergie pour le chauffage, la ventilation, l’éclairage, etc.
L’objectif principal de cet arrêté est d’améliorer progressivement l’efficacité énergétique du parc immobilier existant, sans pour autant imposer aux propriétaires une rénovation complète lorsqu’ils réalisent des travaux ponctuels.
L’arrêté du 22 mars 2017 : performance énergétique des bâtiments tertiaires existants
Cet arrêté s’adresse spécifiquement aux bâtiments tertiaires (bureaux, commerces, écoles, hôpitaux, etc.), qui ont des besoins énergétiques élevés et un rôle clé dans la réduction de la consommation d’énergie en France. Il précise et renforce certaines exigences de l’arrêté de 2007, notamment pour :
- L’isolation thermique des parois opaques et vitrées : obligation d’atteindre des performances minimales pour les murs, toitures et fenêtres.
- Les systèmes de chauffage, ventilation et climatisation (CVC) : obligation de choisir des équipements à haut rendement énergétique, avec une meilleure régulation pour éviter les gaspillages.
- L’éclairage et l’automatisation : les bâtiments tertiaires doivent intégrer des dispositifs de gestion de l’éclairage et de la consommation énergétique, comme des détecteurs de présence ou des systèmes de programmation.
- Les énergies renouvelables : incitation à intégrer des panneaux solaires ou des pompes à chaleur pour réduire l’empreinte carbone.
L’arrêté du 22 mars 2017 a été adopté dans le cadre de la stratégie nationale de réduction de la consommation énergétique des bâtiments tertiaires, qui vise une baisse progressive des consommations d’énergie de 40 % d’ici 2030, 50 % en 2040 et 60 % en 2050.
Pour résumer, l’arrêté du 3 mai 2007 fixe les règles générales pour la rénovation énergétique des bâtiments existants, en imposant des exigences selon l’ampleur des travaux. De son côté, L’arrêté du 22 mars 2017 renforce ces exigences pour les bâtiments tertiaires, avec un focus sur la performance globale, les équipements énergétiques et la gestion intelligente de l’énergie.
Ces deux textes participent à la modernisation progressive du parc immobilier, en réduisant son impact environnemental et en améliorant le confort thermique des occupants.
Réglementation de la Transformation digitale et énergétique des Bâtiments : Quelle est la réglementation RT2012 pour les bâtiments neufs ?
Mise en place dans le cadre du Grenelle de l’Environnement, la réglementation thermique 2012 (RT 2012) a marqué un tournant décisif dans la conception des bâtiments neufs en France. Entrée en vigueur le 1ᵉʳ janvier 2013, elle avait pour objectif principal de diviser par trois la consommation énergétique des constructions neuves par rapport à la précédente norme, la RT 2005.
Pour cela, la RT 2012 impose des exigences strictes et dispositions plus lourdes en matière d’isolation, d’étanchéité à l’air et d’efficacité énergétique des équipements. Elle repose sur trois indicateurs clés : la consommation énergétique maximale (Cep), qui limite la consommation primaire à 50 kWh/m²/an en moyenne (avec des variations selon la localisation et l’altitude) ; le besoin bioclimatique (Bbio), qui favorise une conception architecturale optimisée pour réduire les besoins en chauffage, refroidissement et éclairage ; et le confort d’été (Tic), qui encadre la température intérieure maximale admissible sans recours à la climatisation.
Ces exigences ont conduit à une transformation profonde des pratiques de construction, favorisant l’essor des bâtiments basse consommation (BBC) et des matériaux performants sur le plan thermique.
Une réglementation étoffée par la RE2020
Au-delà de l’amélioration de l’enveloppe du bâtiment, la RT 2012 a également encouragé l’intégration d’énergies renouvelables dans le résidentiel neuf. Pour les maisons individuelles, elle impose l’installation d’au moins une source d’énergie renouvelable, comme un chauffe-eau solaire ou une pompe à chaleur.
De plus, elle a généralisé l’usage des systèmes de ventilation performants, comme la ventilation mécanique contrôlée (VMC) double flux, afin d’optimiser la qualité de l’air tout en réduisant les pertes thermiques. La réglementation a aussi mis en place des tests d’étanchéité obligatoires à la livraison des bâtiments pour garantir la limitation des infiltrations d’air parasites. Toutefois, si la RT 2012 a permis une avancée majeure en matière d’efficacité énergétique, elle a aussi soulevé des défis, notamment en termes de coûts de construction et de complexité technique pour les acteurs du bâtiment.
Ces limites ont conduit à l’élaboration d’une nouvelle réglementation, la RE2020, qui renforce encore les exigences en intégrant cette fois une dimension environnementale, avec un focus particulier sur la réduction de l’empreinte carbone des matériaux et l’adaptation aux épisodes de forte chaleur liés au changement climatique.
Des évolutions rapides portant parfois à confusion
Ces évolutions rapides et contraignantes de la réglementation se justifient par une volonté politique de réduire l’empreinte carbone du secteur du bâtiment.
En effet, le Haut Conseil pour le climat rappelle qu’en 2022, les émissions du secteur du bâtiment représentaient en France 75 Mt eqCO2 en 2022, soit 18 % des émissions nationales.
Et des objectifs ambitieux ont été affichés, la loi du 17 août 2015 fixant notamment le but de 100% des bâtiments rénovés en fonction des normes « bâtiment basse consommations » à l’horizon 2050. Elle fixe aussi l’objectif de rénovation de 500 000 logements par an en France.
Ces objectifs portent donc la transition énergétique, non seulement en favorisant l’ouverture de chantiers de rénovation pour répondre aux normes, mais aussi en fixant des conditions plus exigeantes qui favorisent l’innovation et le développement des technologies et matériaux de rénovation ainsi que des énergies renouvelables.
Ainsi, certains bâtiments rénovés atteignent des standards passifs ou bâtiment à énergie positive. Enfin, des soutiens financiers (crédits d’impôts, subventions, etc…) permettent de soutenir cet effort afin que la réglementation ne reste pas lettre morte.
Une réglementation trop exigeante ?
Toutefois, des efforts doivent encore être faits puisque l’Ademe indique que pour 2022, le nombre de passoires énergétiques représente 19,5 % du parc résidentiel.
En effet, si les objectifs affichés sont ambitieux, leur transcription sur le terrain peut se révéler coûteuse ou techniquement complexe à mettre en œuvre. Les travaux sont souvent chers et on observe souvent une rénovation insuffisante. Ainsi, le cas où seules les fenêtres d’une façade sont changées alors qu’il aurait fallu modifier le bâtiment dans son intégralité est monnaie courante.
La question du bâti ancien est également complexe puisque les travaux de mise en conformité ne sont pas toujours possibles pour des raisons pratiques ou réglementaires.
La filière de la rénovation énergétique à conforter
Et toutes ces difficultés tiennent également au fait que la filière de la rénovation n’est pas encore dimensionnée à l’échelle des ambitions portées par la France. Il conviendra ainsi de développer les compétences et les ressources nécessaires.
De même, le retour sur investissement et l’accès aux différentes aides doit encore être mieux garanti par l’État. En effet, si les dispositifs financiers sont légion (ma prime rénov, prêt éco-PTZ, crédit d’impôt pour les TPE et PME,…), ceux-ci ne représentent encore que peu de volume budgétaire (20 milliards d’euros en 2021, pour une nécessité estimée par l’ADEME à 40 milliards).
Enfin, on pourrait arguer que les évolutions rapides de la réglementation sont facteur de confusion et ne permettent pas la diffusion de pratiques professionnelles et de technologies harmonisées.
Quelles sont les normes de construction pour 2025 ?
En 2025, les règles de construction en France seront principalement encadrées par la Réglementation Environnementale 2020 (RE2020), mise en place en janvier 2022. Cette réglementation vise à améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments neufs tout en réduisant leur empreinte carbone.
Depuis le 1ᵉʳ janvier 2025, les exigences en matière d’émissions de CO₂ ont été renforcées, avec une diminution d’environ 15 % des seuils actuels. Ces ajustements encouragent l’utilisation de matériaux plus durables, notamment les matériaux biosourcés comme le bois.
Par ailleurs, la RE2020 impose des standards plus exigeants en matière d’isolation thermique et de performance énergétique. L’objectif est de limiter au maximum les besoins en chauffage et en climatisation en améliorant l’enveloppe du bâtiment et en intégrant des systèmes énergétiques plus efficaces. Ces nouvelles dispositions visent à garantir un meilleur confort thermique tout en réduisant l’impact environnemental des constructions neuves.
La réglementation énergétique des bâtiments, partie importante d’une transition énergétique plus globale
L’efficacité de la politique de rénovation énergétique française est donc mitigée. D’une part les évolutions réglementaires ont permis d’afficher des objectifs ambitieux et de porter le développement de solutions technologiques plus abouties. Mais en parallèle, ces exigences élevées rendent l’accès à la rénovation coûteux et complexe. Cela sans compter que les dispositifs financiers accompagnant la transition ne sont pas encore à la hauteur des objectifs.
Il conviendra de mieux accompagner cette transition énergétique, de faire baisser les coûts des solutions apportées et de proposer des alternatives lorsque la rénovation « classique » est trop complexe.