
À propos de l’auteur
Ablaye Sarre
Ingénieur Généraliste
Élève à l’ENOV en Mastère TED
Face à l’urgence climatique et aux objectifs européens de neutralité carbone d’ici 2050, la France a adopté plusieurs réglementations pour accélérer la transition énergétique. Deux textes majeurs encadrent désormais la performance énergétique des bâtiments tertiaires : le décret Tertiaire (2019) et le décret BACS (2020). Le premier impose une réduction progressive de la consommation d’énergie des bâtiments tertiaires de plus de 1 000 m2, tandis que le second impose l’installation de systèmes d’automatisation et de contrôle (GTB) pour les systèmes CVC.. Ces textes sont salués pour leur ambition, mais suscitent aussi des interrogations.
Sont-ils à la hauteur des enjeux climatiques ou trop exigeants pour les acteurs du terrain ? Tour d’horizon des arguments. Des décrets nécessaires pour répondre à l’urgence climatique.
Sommaire de l’article :
Des décrets nécessaires pour répondre à l’urgence climatique
Des objectifs clairs et mesurables
Le Décret Tertiaire fixe des objectifs de réduction de consommation énergétique par rapport à une année de référence entre 2010 et 2019 :

Le décret BACS, quant à lui, impose l’installation de systèmes d’automatisation et de contrôle (GTB) dans les bâtiments tertiaires non résidentiels d’ici 2025, si le système de CVC dépasse 290 kW et de 70 kW d’ici 2027.

Des bénéfices économiques et environnementaux
Ces réglementations ne sont pas uniquement contraignantes : elles offrent aussi des bénéfices concrets. Une GTB bien exploitée permet jusqu’à 30 % d’économies d’énergie (ADEME, 2023). Le confort thermique est amélioré, le patrimoine immobilier valorisé, et les émissions de gaz à effet de serre réduites. En effet, un enjeu crucial, puisque le bâtiment représente 45 % de la consommation énergétique finale en France.
Certaines entreprises montrent déjà l’exemple : la SNCF, en équipant 200 bâtiments d’une GTB connectée, a réduit sa consommation de 20 % en deux ans. À Lyon, la tour Oxygène a vu sa performance énergétique nettement améliorée après une mise en conformité avec le décret BACS.
Des obstacles qui freinent leur application effective
Un coût initial dissuasif
Un frein important à l’application du décret réside dans le coût élevé des rénovations. La modernisation des systèmes techniques, demande des investissements conséquents, souvent difficiles à assumer pour les PME ou les gestionnaires de bâtiments anciens.
Exemple : une commune souhaitait rénover un centre administratif. Le devis s’élevait à 600 000 €. Malgré les aides, le reste à charge était trop important. Le projet a été reporté.
De plus, le retour sur investissement est rarement immédiat, ce qui peut décourager les porteurs de projets. L’incertitude financière qui en découle freine l’engagement dans des démarches.
Des défis technologiques non négligeables
Les bâtiments existants sont souvent peu compatibles avec les technologies actuelles. La mise à niveau peut générer des interruptions d’activité, mobiliser des compétences techniques rares, et demander du temps.
En outre, l’évolution rapide des outils numériques ajoute de l’incertitude. Certains gestionnaires hésitent à investir dans des systèmes susceptibles d’être obsolètes dans quelques années.
Exemple : dans un bâtiment neuf, les capteurs sont intégrés dès la construction. Dans un bâtiment des années 2000, il faut souvent ouvrir des plafonds et donc interrompre l’activité du bâtiment et de ses occupants.

Une complexité réglementaire
L’application des décrets implique des démarches parfois techniques et peu claires, ce qui peut prêter à confusion. Cette complexité peut entraîner des erreurs d’interprétation, notamment sur les fonctionnalités attendues, et conduire à une non-conformité. Dans certains cas, cela empêche également les acteurs de bénéficier des subventions auxquelles ils pourraient prétendre. Il est donc essentiel de clarifier les textes pour accompagner efficacement les professionnels du secteur.
S’y ajoutent les spécificités des différents types de bâtiments : écoles, hôpitaux, commerces ou bureaux ne peuvent être traités de manière uniforme. Cette diversité rend la standardisation difficile.
Une initiative ambitieuse, mais pas irréalisable
Les décrets Tertiaire et BACS sont indispensables pour moderniser le secteur tertiaire et répondre à l’urgence climatique. Leur ambition est justifiée, mais leur mise en œuvre reste complexe. Accompagnement, simplification réglementaire et soutien financier seront les clés de leur réussite. La transition énergétique ne se décrète pas, elle se construit avec les acteurs du terrain.
C’est dans cette logique que le Mastère TED de l’ENOV forme les futurs experts capables de piloter concrètement cette transformation. En alliant vision stratégique, compétences techniques et compétences humaines, cette formation prépare les professionnels à relever les défis énergétiques et environnementaux de demain.
