À propos de l’auteur
Vincent Constant
Ingénieur en Transition Énergétique
Directeur Général – ENOV
L’efficacité énergétique a longtemps été centrée sur la conception des bâtiments : orientation, isolation, choix des matériaux. Mais ces dernières années, le regard s’est déplacé vers un levier souvent sous-exploité : l’exploitation.
Sobriété des usages, réglages fins, amélioration des systèmes existants, recours aux énergies renouvelables locales… Travailler sur l’exploitation permet d’agir en continu sur la performance réelle d’un bâtiment, bien au-delà de ce que permet la conception seule.
C’est dans cette logique que le métier d’Energy Manager a pris une place centrale.
- Comment accède-t-on au métier d’Energy Manager ?
- Et que peut-on en attendre, concrètement, en termes de formation, de responsabilités… et de rémunération ?
Sommaire de l’article :
Études : Comment devenir Energy Manager ?
Le métier d’Energy Manager, apparu dans les années 2010, est à la croisée des chemins entre l’ingénierie, la transition énergétique, et la gestion stratégique. Pour y accéder, plusieurs parcours sont possibles, souvent structurés autour de formations scientifiques et techniques, suivies de spécialisations ciblées.
Voici les principales étapes à envisager pour se former au métier d’Energy Manager :
- Bac scientifique ou technologique (STI2D) : une base solide en mathématiques, physique et technologie permet d’aborder les études supérieures avec les fondamentaux requis. La série STI2D est particulièrement pertinente pour se familiariser avec l’énergie, l’environnement et les systèmes.
- BTS ou BUT dans les domaines de l’énergie, de l’environnement ou du génie thermique : des formations comme le BTS Fluides Énergies Domotique (FED) ou le BUT Génie Thermique et Énergie permettent d’acquérir une technicité immédiate et une première expérience terrain, souvent via l’alternance.
- Licence professionnelle spécialisée en efficacité énergétique, énergies renouvelables ou management de l’énergie : ces diplômes d’un an après un bac +2 approfondissent les connaissances dans des domaines très ciblés. Ils sont souvent appréciés des recruteurs pour leur orientation opérationnelle.
- École d’ingénieur (énergie, environnement, bâtiment, génie des procédés) : ce parcours, plus théorique et stratégique, offre une vue d’ensemble sur les systèmes énergétiques. Certaines écoles proposent des spécialisations en 3e année orientées vers l’optimisation énergétique et la gestion durable des ressources.
- Masters spécialisés (bac +5) : en université ou en école d’ingénieurs, les Masters en “Énergie et développement durable”, “Énergétique des bâtiments”, “Management de l’énergie” ou “Transition énergétique” sont conçus pour les futurs cadres en pilotage énergétique.
À l’ENOV, nous avons conçu le Mastère Transition Énergétique et Digitale des Bâtiments pour former spécifiquement au métier d’Energy Manager - Formations complémentaires ou certificats : pour les professionnels en reconversion ou les diplômés souhaitant se spécialiser davantage, des formations continues (type CQP, Certificat de Qualification Professionnelle) et des titres RNCP existent. Elles intègrent souvent les aspects normatifs, réglementaires et logiciels du métier.
- Compétences transversales à acquérir :
- Une bonne maîtrise des outils de modélisation énergétique (ex. : Pleiades, Caneco BT, ClimaWin, etc.) ;
- Des connaissances solides en réglementation thermique et environnementale (RE2020, décret tertiaire, etc.) ;
- La capacité à piloter un projet, suivre un budget, et communiquer avec des interlocuteurs variés (direction, techniciens, fournisseurs, etc.).
- Une bonne maîtrise des outils de modélisation énergétique (ex. : Pleiades, Caneco BT, ClimaWin, etc.) ;
Les 4 grands rôles de l’Energy Manager
Le métier d’Energy Manager repose sur quatre grands piliers qui structurent son action au sein d’une entreprise, d’un site industriel, ou d’un parc immobilier. Il agit à la fois comme analyste, stratège, chef de projet et ambassadeur des bonnes pratiques énergétiques.
Voici les 4 grandes missions stratégiques qu’il assure :
- Suivre et analyser les consommations énergétiques
Il collecte les données issues des compteurs, systèmes de gestion technique du bâtiment (GTB) ou plateformes IoT. Il identifie les postes énergivores, détecte les dérives, repère les gaspillages invisibles. Ce travail d’analyse permet de cibler précisément les leviers d’économie. - Piloter un plan d’actions d’amélioration continue
Il propose des actions concrètes : réglage des équipements, travaux d’isolation, modernisation du système de chauffage ou ventilation, changement d’éclairage, etc. Ces mesures sont hiérarchisées selon leur efficacité, leur coût et leur faisabilité. L’Energy Manager suit leur mise en œuvre et ajuste le plan en continu. - Sensibiliser les équipes et accompagner le changement
Il ne s’agit pas seulement d’intervenir sur la technique : les comportements comptent aussi. L’Energy Manager organise des campagnes de sensibilisation, forme les occupants aux écogestes, et mobilise les parties prenantes autour d’une démarche collective. Il fait vivre une culture de la sobriété énergétique. - Assurer la conformité réglementaire et valoriser les résultats
Il veille au respect des obligations réglementaires : décret tertiaire, audits énergétiques, déclarations environnementales. Il rédige des bilans, alimente les rapports RSE et peut accompagner la certification ISO 50001. Il valorise les gains obtenus, à la fois en énergie, en CO₂ et en coûts, auprès de la direction.
Les principales tâches et missions de l’Energy Manager
Au-delà de ses grands rôles stratégiques, l’Energy Manager exerce au quotidien un ensemble de tâches opérationnelles qui structurent son action. Son travail est transversal : il navigue entre les services techniques, les achats, la direction, et les occupants du bâtiment. Il peut intervenir aussi bien dans l’industrie que dans le tertiaire ou les collectivités.
Voici les missions principales qu’il prend en charge :
- Établir un diagnostic énergétique précis
L’Energy Manager réalise un état des lieux de la performance énergétique : analyse des consommations, des factures, du fonctionnement des équipements, de l’isolation du bâti… Il s’appuie sur des outils de mesure, des audits, et des logiciels de suivi énergétique. - Définir une stratégie énergétique adaptée
En fonction des objectifs de l’entreprise (économies, décarbonation, obligations réglementaires…), il construit une feuille de route. Celle-ci peut intégrer un plan pluriannuel d’investissement, des choix technologiques, et un pilotage par indicateurs. - Mettre en place et piloter des actions d’amélioration
L’Energy Manager initie ou coordonne les projets : modernisation de l’éclairage, amélioration du chauffage, installation de systèmes de récupération d’énergie ou d’ENR (énergies renouvelables). Il suit les chantiers et mesure l’impact des actions engagées. - Suivre la performance énergétique dans le temps
Grâce à des outils de suivi (tableaux de bord, GTC, capteurs connectés…), il contrôle l’évolution des consommations. Il identifie les écarts par rapport aux objectifs fixés et ajuste les réglages ou les comportements en conséquence. - Former et mobiliser les parties prenantes
Il anime des formations internes, des ateliers de sensibilisation, ou des comités de pilotage. Son objectif : ancrer les bons réflexes et faire adhérer l’ensemble des équipes à une logique de sobriété énergétique.
Qu’est-ce qu’un Système de Management de l’Énergie (EMS) ?
Le Système de Management de l’Énergie (EMS) est l’outil de pilotage central de l’Energy Manager. Inspiré du fonctionnement d’un système qualité ou environnemental, il permet de structurer l’amélioration continue de la performance énergétique dans le temps.
Parmi ses principaux composants, une politique énergétique formalisée. C’est le socle de l’EMS. Elle définit les engagements de l’organisation en matière de consommation, de réduction des émissions, ou de recours aux énergies renouvelables.
Ensuite, des objectifs et indicateurs mesurables. L’EMS s’appuie sur des indicateurs (kWh/m², tonnes de CO₂, ratio par unité produite…) et des cibles chiffrées. Cela permet de suivre précisément les résultats.
On retrouve aussi une cartographie des usages énergétiques significatifs. L’Energy Manager identifie les processus ou équipements les plus consommateurs. Cela oriente les priorités d’actions. A quoi l’on associe un plan d’actions d’amélioration continue. L’EMS s’inscrit dans une démarche PDCA (Plan – Do – Check – Act). Chaque action est programmée, suivie, évaluée, puis corrigée si nécessaire.
Par ailleurs,l’usage d’un système documentaire clair et auditable. L’EMS inclut des procédures, des rapports de suivi, des fiches de mesure, des retours d’expérience… Il garantit la traçabilité et la pérennité de la démarche.
Enfin, un pilotage régulier et transversal. Des comités énergie ou des référents locaux peuvent être mis en place. L’Energy Manager anime cette gouvernance pour maintenir l’implication dans la durée.
L’EMS est souvent aligné sur la norme ISO 50001, référence mondiale en matière de management de l’énergie.
Les normes ISO à connaître pour ce métier
L’Energy Manager ne travaille pas à l’aveugle : son action s’inscrit dans un cadre méthodologique reconnu à l’échelle internationale. Ce cadre repose sur plusieurs normes ISO qui guident la mise en œuvre d’une démarche énergétique structurée, cohérente et mesurable. Ces normes ne sont pas obligatoires dans tous les cas, mais elles constituent des référentiels précieux pour garantir la qualité, la traçabilité et l’efficacité des actions engagées.
Norme ISO 50001
C’est la norme centrale pour l’Energy Manager. Elle définit les exigences pour mettre en place un système de management de l’énergie efficace. Elle repose sur une démarche d’amélioration continue (PDCA) et vise à réduire les consommations tout en améliorant la performance globale.
Norme ISO 14001
Cette norme concerne le management environnemental. Elle est souvent complémentaire à la 50001 dans les organisations qui visent à réduire leur impact global, pas seulement énergétique. Elle favorise une gestion globale des risques environnementaux.
Norme ISO 26000
Bien qu’elle ne soit pas certifiable, cette norme propose des lignes directrices sur la responsabilité sociétale des organisations. Elle intègre des dimensions éthiques, sociales et environnementales, que l’Energy Manager peut valoriser dans une stratégie d’entreprise durable.
Norme NF 16247 & Décret tertiaire
Outre les normes ISO, la norme NF EN 16247 (audit énergétique) et le Décret Tertiaire sont deux textes incontournables pour tout Energy Manager. La première encadre la méthodologie des audits énergétiques obligatoires pour les grandes entreprises, garantissant la qualité, la rigueur et l’exploitabilité des recommandations. Le second impose aux bâtiments tertiaires de plus de 1 000 m² une réduction progressive de leur consommation énergétique, avec des objectifs chiffrés à atteindre d’ici 2030, 2040 et 2050. Ces cadres réglementaires structurent l’action de l’Energy Manager, entre conformité, stratégie de performance et mise en œuvre de solutions concrètes sur le terrain.
Quel salaire pour un Energy Manager, junior et senior ?
Le salaire d’un Energy Manager dépend de plusieurs facteurs : le niveau d’expérience, le secteur d’activité, la taille de l’organisation, la région et parfois le niveau de certification ou d’expertise technique (ex : maîtrise de la norme ISO 50001, conduite de projets complexes, etc.).
Energy Manager débutant (0 à 3 ans d’expérience) :
- Fourchette salariale : entre 30 000 € et 40 000 € brut annuels.
- Type de structures : entreprises industrielles, bureaux d’études, collectivités territoriales ou sociétés de conseil énergétique.
- À ce stade, l’Energy Manager participe souvent à des audits, à l’analyse des consommations et à la rédaction de rapports, sous la supervision d’un référent plus expérimenté.
Niveau confirmé (3 à 7 ans d’expérience) :
- Fourchette salariale : entre 40 000 € et 50 000 € brut annuels.
- À ce niveau, l’Energy Manager est autonome dans ses projets : il conçoit des plans d’action, pilote les opérations, assure le suivi des indicateurs de performance, et peut coordonner une équipe technique ou gérer plusieurs sites.
- Il peut aussi intervenir dans la réponse à des appels d’offres, dans le montage de dossiers de financement ou dans la mise en œuvre de certifications.
Energy Manager senior (plus de 7 ans d’expérience) :
- Salaire : jusqu’à 60 000 € à 70 000 € brut annuels, voire davantage dans les grands groupes ou à l’international.
- Le rôle prend alors une dimension stratégique : élaboration de politiques énergétiques globales, négociation avec les directions générales, intégration dans des démarches RSE ou ESG, pilotage de systèmes de management multi-sites.
Par ailleurs, des primes de performance peuvent compléter la rémunération : atteinte d’objectifs de réduction, obtention de labels, réalisation de gains mesurables. Dans certains cas, l’Energy Manager peut évoluer vers des postes de direction technique, de responsable développement durable ou de gestionnaire de patrimoine énergétique.
Alors, envie de se lancer ?